Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

26/08/2021

Garder le cap

Depuis quelques matins, en me rasant devant la glace, je repère le front  plissé d’un type qui file le mauvais coton d’une triste personne âgée. Je comprends moins les films parce que j’entends mal, des mots s’évanouissent quand j’en ai besoin, et surtout c’est la petite forme, pas tellement physiques, mes activités sportives m’ayant habitué à cette décrue. Mais plutôt une perte d’énergie qui me fait renoncer à des projets sur lesquels je me serais jeté avec délectation auparavant. Il ne manque plus qu’à se recroqueviller sous sa tente, et on s’embarque sur un chemin d’acariâtre.

Durant mes folles années d’adolescence, j’avais décidé que je mourrais à 30 ans. On a vu. Avec un peu plus de maturité, j’ai décidé que je fêterais au moins mes 90 ans. Mais balloté dans un flux de ruminations négatives, le chemin pour y parvenir risque de s’apparenter à un chemin de croix. Aurai-je la capacité de progresser à contre-courant ? Regardons les choses calmement.

D’abord, nous ne sommes pas malheureux. Certes, on ne fait pas partie des 10 % les plus riches, ni même des déciles suivants. Mais je suis assez riche pour payer des impôts et atteindre chaque fin de mois sans angoisse, et même ponctuée de quelques gâteries.

Notre maison est située dans un lieu semi-campagnard où la possibilité d’être victime innocente d’une balle perdue est extrêmement réduite. Nos voisins sont d’une grande gentillesse à notre égard. Ils nous ont soutenus lors du confinement et encore aujourd’hui, ils nous gâtent de haricots, de poires, de tomates. Et bio, avec ça !

Certes, on a aussi les 2 chiens dont les chants alternés ne nous séduisent guère. Mais sans eux, qui nous fournirait notre moment de grognonnerie nécessaire pour éviter l’ennui !

Notre famille fonctionne dans une certaine harmonie, ponctuée de quelques éruptions libératrices de pression. On n’est pas guetté en tous cas par un ennemi monstrueux susceptible de fondre sur nous et nous déstabiliser.

Mon épouse a écopé de divers handicaps, mais elle s’acquitte de ses activités avec courage et le plus de sérénité possible. J’ai la chance quant à moi de disposer d’assez de jus pour me livrer à diverses pratiques sportives auxquelles de plus jeunes ont du renoncer.

Et puis, il y a devant la porte notre condensé de vacances à roulettes qui nous emmène où on veut quand on veut. Qui n’est pas jaloux si on prend d’autres roulettes pour d’autres types de voyages.

L’addition de ces différents items donne un bilan plutôt positif qui ne nous rend pas forcément éligibles à un bonheur permanent. Mais, pour les années qui me restent à vivre, au moins jusqu’à 90 ans donc, j’ai décidé de garder mon esprit disponible à l’éclosion de petits bonheurs. Et cela aussi souvent que possible. Alors, rendez-vous demain devant ma glace !

17:16 Publié dans santé | Lien permanent | Commentaires (2)

03/06/2021

Je me hâte avec lenteur

Une jeune pousse de mon entourage, lorgnant sur « L’éloge de la lenteur » abandonné sur ma table de nuit, déclarait, il y a peu, que ce titre ne m’était pas approprié. Ce généreux démenti m’a laissé dans une impression de faux-cul qui se la joue tellement nombre d’indices pointent chez moi vers la lenteur, parmi les autres signes de vieillesse.

Notre cuisine par exemple, et ma table de « travail » non moins, sont constellées d’affichettes de taille et de couleur différentes rappelant des choses à échoir. Il ferait beau voir à mon âge que j’oublie un R.V. de docteur. Les dits-docteurs remplissent mon agenda, mais à mesure qu’approche l’échéance, je redouble avec une affichette.

Là où l’affichette serait utile, mais pas très commode, c’est dans la conversation où le mot recherché s’échappe de plus en plus. S’agissant de la capitale du Kirguizistan, passe encore. Mais il s’agit maintenant de lieux mille fois parcourus, à notre porte, que je  ne retrouve pas le moment voulu. Je me lance alors dans un vrai concours de périphrases pour tâcher de désigner le manquant. Du moins cela fait travailler mes neurones, et même ceux de l’interlocuteur occupé à  résoudre cette sorte de jeu de piste.

Sans avoir pris de centimètres en largeur, j’ai un peu de mal à viser ceux des portes et j’accroche couramment tout objet, clé, poignée, qui dépasse. Je ne rate pas toujours la moindre anfractuosité su sol. On se sent vieillard quand le pied vient buter sur ces reliefs minuscules.

Je peux me désoler aussi d’un cerveau devenu le cimetière de plein  de projets qui m’ont enthousiasmé et qui restent à l’état de rêve. J’ai accepté d’avoir perdu du muscle, ce que me disent les sorties à ski ou à vélo. Pourtant, les neurones du cerveau seraient-ils des muscles tellement affaiblis que je manque à ce point d’énergie pour en réaliser quelques-uns ?

Malgré des jambes, pas encore en coton mais déjà plus en acier comme autrefois, je me bouge avec des marches et des indigestions de vélo. J’ai trop peur de ce supplice pseudo-médical qui pousse les vieux à la marche forcée : être affligé  d’un chien qui oblige à sortir matin et soir pour faire pisser l’animal.

10:07 Publié dans santé | Lien permanent | Commentaires (1)

14/04/2021

J'apporterai le dessert

Depuis plusieurs mois, notre vocabulaire s’est enrichi de termes dont on avait peu l’usage : charge virale, taux d’incidence. Sans oublier la sarcopénie (perte des muscles) probable à faire des tours dans un cercle de 10 kms de rayon. Ce salmigondis médical cache mal la forêt d’expressions qu’on ne pratique plus. Parmi celles-ci, la très simple : « J’apporterai le dessert », qui marquait l’adhésion spontanée à une promesse de rencontre heureuse.

Ce n’est pas seulement l’expression qui a disparu mais avec elle les sérieux préparatifs qu’elle promettait. Avec une 1ère question : « Qu’est-ce que je vais bien pouvoir leur faire » ? En effet, lui n’a pas aimé la tarte au citron, elle a une aversion pour la vanille, et je ne peux pas leur refaire la mousse au chocolat de la dernière fois.

Mes savoir-faire glanés chez ma belle-mère, ma mère ou  simplement auprès de mon épouse composent un catalogue assez réduit. Aujourd’hui, j’aurais choisi la traditionnelle tarte aux pommes. L’empilement rigoureux  des tranches donne déjà un aspect esthétique propre à titiller les papilles. Mais aussi ce soin minutieux permet aux hôtes de lire l’affection que je leur porte.

Rendus à l’invitation, on sait que nos hôtes n’ont pas fait un stage chez Bocuse. Mais on est sûrs que l’hôtesse a mijoté un « vrai plat du dimanche », que l’hôte a déniché une bonne bouteille et que cela va animer la rencontre. Ensuite il est assez habituel de s’extasier sur le dessert, une manière de mettre le point final aux échanges avant qu’ils ne soient trop animés.

On rêve bien sûr d’oublier bientôt le galimatias médical pour des conversations pleines de paysages, de visites, de projets. Nous attendons pour cela une vaccination générale qui nous remettra dans la vie et où nous pourrons redire : « J’apporterai le dessert » !

16:53 Publié dans santé | Lien permanent | Commentaires (0)