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02/09/2024

" A la recherche du temps perdu"

J’ai souvent dit que je me sentais du siècle dernier. Et le tsunami des informations qui défilent aujourd’hui ne laisse pas le temps d’en attraper une. Cette réflexion m’est venue d’un incident récent. J’apprends au hasard d’une rencontre que 2 copains de boulot, et surtout de vélo, sont morts sans que je l’aie su.

Evidemment  en 2024 comme il y a 50 ans les jours ont toujours 24 heures ponctuées de balise, repas, sommeil, mais les interstices de temps « libre » ne sont plus remplis de la même manière. Il y a les branchés. Nous discutons dans le salon. Un branché a senti vibrer son smartphone dans sa poche. Il lit message, y répond  et poursuit la conversation.

L’empilement des infos ne trouble pas ces très branchés. Pourtant ce pauvre Delon an a fait les frais. Star entre les stars, icone internationale, son décès n’a pas tenu « la une » pendant une semaine. Malgré qu’il ait joué les prolongations avec une question subsidiaire : pourrait-il être enterré dans sa propriété du Loiret ou non ?

Ce déferlement des infos empêche qu’on s’intéresse à aucune. Des réfugiés se noient en Mediterranée de hier, d’autres se noient en Manche aujourd’hui. L’info est aussi froide qu’une statistique. Tous les coquins de la planète savent que leurs vilenies de cette semaine seront effacées la semaine prochaine. Le temps de la justice est un temps long. Depuis 2007, on attend devant la porte de la Santé Sarkozy les chaussures délacées et la cravate défaite, sur ses comptes de campagne.

Au siècle dernier, un employé partant en retraite recevait en cadeau une canne à pêche ou un fauteuil. C’est dire l’avenir entrevu. Aujourd’hui, on lui offre une montre connectée. Pour sa santé on est heureux de connaitre son  rythme cardiaque ou son nombre de pas. Maintenant la montre nous transmet les mails, le téléphone et permet de répondre.

Tous ces hyper connectés sont heureux d’aller bientôt sur Mars (mon Dieu, quoi faire sur Mars) risquent un orgasme à chaque avancée de l’intelligence artificielle. Celle-ci va dénicher la virgule sournoise de votre contrat d’assurance, comprendre le langage abscond d’un formulaire administratif et y répondre.

Mais alors que fait-on  de notre intelligence quand on ne s’en sert plus ? Aller à la pêche ? Cela m’évoque les parties de pêche avec mon père en barque sur le Doubs. Une image très désuète mais tellement réconfortante. Je vais prendre le temps de la contempler !

25/08/2024

"Les Précieuses Ridicules" pas vraiùment passées

Je me pique d’écrire et de parler un français plutôt convenable. Et depuis longtemps. Ma future épouse trouvait que mes lettres étaient parfois savantes. Peut-être de la même manière qu’on choisit son meilleur costume pour postuler à un emploi, je ciselais les meilleures phrases pour lui plaire. Vaine recherche alors et maintenant où des expressions employées me laissent perplexe.

Je ne parle pas du langage spécifique qu’emploient certaines professions pour se ménager ainsi un quant-à-soi. En lisant par exemple un compte-rendu post-opératoire, on se demande si c’est bien de soi dont il parle et même de l’organe blessé.

Intronisé tôt dans la confrérie cycliste, j’en connais le vocabulaire. J’ai même du, ici même, expliquer la différence entre se faire « la bosse » et se taper « un méchant coup de cul ». Je n’insisterai pas pour ne pas  risquer de faire le pédant du vélo.

La corporation des politiques pratique les éléments de langage. C’est une façon de ne pas dire ce qu’on pense en employant les mots qui le signifient quand même. Pour des gens qui se réclament du peuple ne serait-il pas préférable de parler clairement ?

Chez les politiques et chez tout le monde à tout bout de champ, on change de paradigme. Avec le paradigme, on sent que chacun s’est constitué durement un modèle et qu’après une difficile révolution intérieure, on doit en changer.  Bien sûr, changer de paradigme vous a une autre allure que bêtement changer d’avis.

S’il avait su qu’il pratiquait un oxymore, Corneille n’aurait peut-être pas osé « cette obscure clarté qui tombait des étoiles ». Résolument antique, j’avoue  préférer l’innocence cornélienne à certains galimatias dont on abuse souvent.

Le mot qui fait fureur aujourd’hui, c’est procrastination. Quand je dis que pour le tri de ma bibliothèque, je suis en pleine procrastination, c’est bien plus élégant que d’avouer que je suis faignant. Et je me le permets, le président de la république lui-même, et ça énerve Mélenchon, fait de la procrastination pour le choix suprême qu’on attend de lui. 

On a tous besoin à un moment de s’offrir un petit coup de vulgarité. Mais chez certains seulement de haute tenue. Mon ami Jacques ajoute   à un parler châtié des origines bourgeoises où par exemple les enfants vouvoient les parents. Ce très strict garçon m’a laissé sur le cul ( moi je peux, je ne suis pas bourgeois) quand il a déclaré d’un gars qui pétait de trouille : « il ne bandait que d’une » Quand on essaie d’imaginer l’exercice, le gars devait avoir de sacrées bonnes raisons d’avoir peur.

19/08/2024

Brèves de parler vrai jurassien

Les gens de ma génération ont au moins un avantage, celui d’avoir effectué leurs études avant l’arrivée du smartphone. Certaines expressions passées par les oreilles plutôt que le téléphone sont encore présentes à mon esprit plus de 70 ans plus tard. C’est le cas de quelques pépites cueillies dans mon pensionnat religieux dont j’ai envie de vous faire part.

Notre supérieur, maître es-rectitude, qui faisait aussi la géographie en 1ère a osé un jour : « il y a 2 sortes de fromage, le Brie et le non-Brie ». Ce jeu de mots simplet venant de cet homme compassé me laisse encore ébahi.

C’est aussi lui, en moins souriant, qui prévoyait à chaque rentrée et chaque fin d’année un prédicateur chargé de blinder nos consciences. Lui aussi a osé : « Attention mes amis, la femme c’est Satan ». Ce taliban,  n’a probablement pas connu les joies de la chair mais a connu  les mille autres malices de  Satan.

Comme dans l’hôpital de l’époque, les diverses servitudes, cuisine, santé, étaient assurées par des bonnes sœurs. Pour améliorer la nourriture de cet après-guerre, il y avait un jardin et une étable avec quelques animaux dont une vache. L’entretien de celle-ci, trop dur pour les sœurs, avait nécessité un vacher, Jules. Et la délicieuse naiveté dans la bouche de l’économe : « depuis que Jules est là, les sœurs ont plus de lait » 

L’établissement connut un  début d’épidémie d’oreillons, dont un effet indésirable peut être la suppression de la capacité génitrice des garçons.. La sœur infirmière avais « rassuré » les 1ers malades : «  pour vous, futurs prêtres, ça n’a pas d’importance » Pour certains d’entre eux, épargnés du couperet fatal des oreillons, ont montré plus tard que ce pronostic était erroné.

Les pièces de ce florilège me sont venues à l’esprit en entendant ma très jurassienne épouse dire d’objets éparpillés qu’ils étaient « à l’abade ». L’expression dont la consonance évoque le mot débandade, s’applique aux vaches prises d’un moment d’excitation qui se mettent à gambader dans tous les sens. Un parler dont cette enclave jurassienne en déborde. Gardons-en la fraîcheur avant qu’un localier zélé ne la propose parme les option au bac.

Je comprends mon ami Nicholas, grenoblois pur sucre, fan des vacances dans le Jura. Je l’imagine, sur la terrasse de la ferme qui l’accueille, dégustant ses dés de Comté, avec un verre de Savagnin et ces parlers locaux virevoltant autour de ses oreilles, ça vous comble un apéro.        

08:48 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (0)