09/05/2019
Abondance de paroles jamais ne sera nourriture (proverbe malgache)
Revenant d’une rando à vélo, les yeux éblouis pleins de souvenirs de paysages de gorges somptueuses ou de cette grotte Chauvet merveilleusement reconstruite ou des échanges croquignolets des 4 générations présentes, je ne me sens pas capable de les exprimer à la hauteur voulue. Je n’ai plus qu’à revenir vers un quotidien fadasse plus à ma portée.
Réveillé pourtant ce matin par cette curiosité : pour 40% de votants attendus, on compte 33 listes aux européennes. Certes pas toutes fanatiques du destin européen. Ne serait-ce que les présumées 2 premières très occupées à rejouer la revanche de la présidentielle. Et il faut bien tout le brouhaha médiatique pour que le demi-point qui les séparerait soit considéré comme l’enjeu majeur de l’élection.
Dans le capharnaüm annoncé, les partis de gauche ont joué leur partition habituelle : le fake-puzzle. Soit des pièces disséminées partout et il faut absolument éviter que l’une s’emboite avec une autre. Si par hasard cela se produisait, au vu des échanges vipérins qui ont précédé, l’allure du tableau ainsi réalisé serait d’un piètre goût.
Ces milliers de gilets jaunes qui ont réussi à perturber le fonctionnement de l’état se devaient d’être là. A leur façon : avec 3 listes irréconciliables. De ce qu’on avait pu saisir sur les ronds-points, il n’émanait pas de leurs discussions un ardent souci de restaurer l’Europe.
Cette élection a le don de faire surgir un certain nombre de candidats-clowns. Ils sont rejoints cette fois-ci par de nouveaux artistes tels que le « parti animaliste » ou le « parti pirate ». Malgré son côté folklorique, la liste « esperanto » a du moins une coloration qui pourrait être européenne.
Ces européennes nous offrent une autre bizarrerie. Alors qu’à la création de l’Europe, on voulait cimenter la paix entre les nations, c’est maintenant dans chaque nation qu’elle provoque la guerre !
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24/04/2019
"La démocratie, c'est le pouvoir des poux de manger les lions" (Clémenceau)
Parmi les choses positives qu’ont pu révéler les gilets jaunes, il y a la remise en grâce des fameux corps intermédiaires, et particulièrement les maires, en tant que fidèles servants d’un lien social et citoyen de qualité. Ce prestige retrouvé masque mal les soucis qu’encourent ces élus. Et ils sont tellement occupés qu’ils n’ont guère le temps pour le dire de courir les plateaux T.V. squattés par les bavards habituels.
Et des soucis, ils en ont. On leur demande d’arbitrer entre les emplois espérés d’une future grande surface et la mort probable du centre-ville. Et les tenants d’un camp s’en prendront à lui plutôt qu’à l’autre camp. Et de la même façon, lui sera imputée la fermeture d’une classe de l’école plutôt qu’attaquer le « mammouth » de l’éducation nationale.
Pour se remettre des grosses misères, il lui reste la gestion des crottes sur les trottoirs ou des ordures à côté des bacs ad-hoc. Ou encore pour éviter le tribunal, tâcher de convaincre le récent possesseur parisien d’une résidence à la campagne que le coq a le droit, lui aussi, de chanter sa joie de vivre, dès le matin, même le samedi. On comprend le pourcentage élevé (33%) de ces élus qui veulent laisser l’écharpe la prochaine fois.
Du moins dans les petites communes. A Paris au contraire, l’abondance de candidats dans le seul parti LREM, avec ce programme fluet : « tout sauf Hidalgo », ferait croire à une grosse gâterie. Tous ces frétillants prêts à servir la cité pourraient se souvenir que depuis Chirac, le coup du Président à suivre ne marche plus. Pas même pour redorer un blason flétri : ce que se dit Erdogan qui a vu s’échapper Istanboul et Ankara malgré une pub très partisane.
Encore les gilets jaunes pour nous dire, en gros (très gros !), qu’il y a une autre France à côté de Paris. Et pour les 2/3 de candidats en lice malgré tout pour 2020, ils peuvent se dire que dans la trilogie en honneur dans nos campagnes, le curé a disparu, l’instituteur risque de disparaitre, lui le maire, demeure le pilier fiché dans la glaise pour encore pas mal de décennies.
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05/04/2019
Le climat se déglingue, le respect aussi
C’est assez courant pour ma génération de présenter la trilogie « le maire, le curé, l’instituteur », et la déférence qui leur était due, comme le parangon d’une sociabilité acceptée. Ce qui est incomplet car en ces époques « bénies », le respect, la courtoisie, valaient pour tous de la part de tous. Mes contemporains ne vont pas manquer de faire remarquer que c’est là une vue un peu édéniste, car, soulignent-ils, il y a eu des mal-élevés de tous temps. Et la sagesse présumée des anciens s’est un peu délitée au gré des révolutions numériques, morales, religieuses.
Il n’empêche, je trouve qu’il y en a un peu plus et singulièrement vis-à-vis des vieux à qui on manquait rarement de respect autrefois. L’illustration date de quelques minutes. Marchant sur le trottoir, je vois venir à ma rencontre 3 jeunes, probablement sportifs puisqu’avec ballon. Ne voulant pas interrompre leur conversation, c’est un petit bulldozer qui s’avance et me fait rejoindre la voie des autos.
Certains de mes collègues en âge estiment que ces comportements sont dus au fait que les vieux sont devenus transparents. Je ne le crois pas, en témoigne cet exemple. Dans le bus, ce jeune qui m’a envoyé son sac dans la figure pour se jeter sur une place libre affiche un sourire narquois à mon passage qui dit bien : avec ton pas de civilisé, tu t’es fait piquer ta place.
Pour ne pas charger davantage ces jeunes, je dois confesser que des vieux, cyclistes par exemple, occupent la chaussée comme en terrain conquis. La conduite de leur engin évoque celle adoptée par quelques mères vous poussant dans les jambes une poussette-char d’assaut, puisqu’elles sont sûres de véhiculer le Mozart du siècle.
Je ne suis pas sûr que mon âge, qui ne se voit pas au 1er coup d’œil sur les pistes de fond, en soit la cause. Mais j’ai encaissé en Vanoise de la part d’un ni-jeune, ni-vieux, à qui je n’aurais pas laissé assez de piste à ses exploits le peu aimable : « vieux con » ! En 35 ans de pratique assidue des pistes, j’ai pu surprendre quelquefois des signes d’énervement, des sourires de commisération, mais jamais d’injures en ces lieux voués au plaisir.
De ces quelques rebuffades, je ne conclus pas que quelques affolés de la planète à 10 milliards d’habitants cherchent à passer par-dessus bord ceux qui ont déjà bien vécu. D’ailleurs des jeunes se rendant au stade, des autres probablement, nous saluent respectueusement. Et quand mon épouse, à celui qui vient de jeter son papier par terre, lâche son habituel : « tu as perdu quelque chose », elle ne récolte pas de doigt d’honneur, ni même un soupçon de grommelement entre les dents.
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