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19/02/2019

"Au bout de chaque rue, une montagne" (Stendhal)

Venant de Nevers, statufiée en provinciale endormie depuis le film d’Alain Resnais, je suis arrivé il y a un peu plus de 40 ans, dans la frétillante Grenoble. Une agitation venue moins de ses étudiants et de ses centres de recherche que de son ancienne « gloire » remise sur le devant de la scène : le fameux “milieu”. On se souvient du sketch de F.Raynaud et de l’inoubliable « Dis, tonton, pourquoi tu tousses ? »

Aujourd’hui, on ne rigole plus car dans le milieu, notamment de la drogue, on tue. Même le maire pacifique de la ville ose la décrire en Chicago et réclame des renforts de police. Ce que reprend mon ami ex-policier, qui croyait pourtant en avoir vu d’autres dans ses campagnes antérieures, au vu des fusillades qui ponctuent l’actualité.

Au contraire, même si cela concerne un autre sujet, on affiche fièrement, sur de grands panneaux à l’entrée de la ville, qu’on entre dans une « métropole apaisée ».Vouloir obtenir  cela grâce à 30 km/H en agglomération relève plutôt de la méthode Coué, d’autant que les policiers, dans ce nouveau Chicago, sont mobilisés sur d’autres théâtres d’opération ! Notre maire, écolo pur jus, ne désarme pas : une autoroute à vélo sur l’axe central de la ville. Et avant qu’un cycliste n’atteigne les 30 à l’heure, les policiers peuvent vaquer à d’autres paisibles occupations

Les grenoblois sont couramment moqués pour leur vêture, labellisée sous le nom du style-anoraks. Mais au pays de « la journée des tuiles » ou de Mandrin, on n’en a cure. D’autant qu’au moment des vacances, les parisiens, qui peuvent être des marseillais, sapés comme des milords (de sports d’hiver), bafouillent méchamment sur leurs skis ou même leurs raquettes.

Autre sujet d‘étonnement des « étrangers » : l’accent grenoblois auprès duquel ceux du Québec ou de Marseille ne sont que de douceâtres bluettes. N’empêche : lorsqu’un autochtone me fait le commentaire, à la base d’un col à vélo, avec son accent rugueux, j’ai vite fait de traduire qu’on ne se prépare pas une partie de plaisir.

On voit bien que seul un esprit quelque peu anticonformiste peut s’épanouir dans cette métropole à contrastes C’est le moment de se souvenir des propos d’un journaliste aux J.O. de 68 décrivant Grenoble comme « une fausse perle dans un bel écrin ». Je m’accommode de la perle  puisqu’elle m’offre, à vélo ou à ski, bien du plaisir dans les méandres de son écrin.

17:05 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (1)

06/02/2019

Le français qu'on cause

On me taille assez couramment, plutôt pour le pire que pour le meilleur, un costume d’intello. Dont la principale manifestation consiste à écrire en respectant l’orthographe. J’ai donc, très logiquement, sursauté lors du récent « Baromètre Voltaire ». Sur un échantillon assez large de 100000 sondés, une petite moitié des cadres d’entreprise maîtrise l’orthographe. Plus ennuyeux, chez les étudiants, ils ne sont plus que 44%.

Pas vraiment étonnant quand on observe que là où on pratiquait un français correct, les journaux, les livres mêmes, le laisser-aller domine outrageusement. Inutile d’incriminer ceux-ci ou ceux-là, on en est là ! Ce qui autorise une tolérance dont abusent les présentateurs de radio ou télé, et leurs invités.

Dans ces conditions, le « parler-texto » fleurit mieux que les roses de mon jardin. Ce nouveau langage atteint son apogée sur les réseaux sociaux, réceptacle obligé du grand n’importe quoi qu’ils véhiculent. Avec une notable recherche d’originalité. Par exemple, on n’écrit pas : dès que possible. On lui préfère, tellement plus classe, ASAP (as soon as possible)

Notre pays, tellement féru de clans antinomiques, droite/gauche, machistes/féministes, ne pouvait manquer d’opposer au langage vulgaire un regain de termes riches. Et pour montrer qu’on n’est pas tombé de son  dernier bac, on en remet une couche. C’est ainsi que fleurissent les « oxymores », les « hubris », les « paradigmes ».

Et on est créatif,  on forge des « démocratures », des « happycraties », voire des « capitalocènes », tous vocables  qu’on ne case pas facilement dans la conversation et d’ailleurs peu entendus dans les interviews de gilets jaunes.  C’est bien le problème, celui du juste milieu : comment parler pour être compris. A l’époque où le ridicule ne tuait déjà plus guère, Mitterand, lettré s’il en fut, nous avait fait une petite scénette avec Mourousi en se targuant d’une maîtrise du « chebran ».

Dans notre langue si riche on doit pouvoir  trouver des mots, des phrases pour exprimer clairement, simplement, et dès l’école, à quoi servent les impôts, les représentants élus. Cela pourrait permettre, peut-être, d’obtenir une adhésion, plutôt que le refus, à ces piliers qui assoient notre république.

08:55 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (0)

23/01/2019

Un journal, des journalistes, des "journaleux"?

J’ai envie aujourd’hui de dénoncer cette manie qui prolifère, celle de ranger des gens dans des cases et uniformisés alors sous l’article défini LES. C’était frappant à propos de cette multitude de citoyens, ainsi désignés, les gens des classes moyennes. En oubliant que, statistiquement, la classe moyenne couvre 6 ou 7 déciles de population. Donc forcément assez différents. Quant à généraliser en parlant de cet ensemble très hétérogène,  les français, on voit que le moment est plutôt mal choisi.

Pas très rigoureux, je vais justement tomber dans le travers dénoncé plus haut. Et parler d’une corporation mise en évidence ces temps-ci : les journalistes rangés dans un même sac, du moins pour les critiques. On leur reproche d’avoir sacrifié l’analyse au profit de l’immédiateté. Pour leurs lecteurs, passablement fans des réseaux sociaux, ils font monter la mayonnaise sur un mot, une phrase mis en exergue. Et puisqu’on vit dans l’image, ils piquent sur celle qui fera mouche. Les « gilets jaunes » ne leur doivent-ils pas quelque peu leur mise sur le devant de la scène ?

D’autres critiques plus sournoises en font les servants dévots des milliardaires qui ont investi dans les médias. Je crois ces magnats assez intelligents pour laisser aller son chemin un titre qui s’est forgé une image depuis des décennies.

On leur prête aussi des revenus plantureux. Mes sources confirmées leur laissent en tous cas la fameuse niche fiscale qu’on peut leur envier. Mais sur les 600 niches encore en place, ce n’est pas forcément la 1ère à faire sauter. Et d’ailleurs, ne méritent-ils pas un bonus ces forçats des news prêts à sauter sur le Nagra à la moindre séquence explosive ou à se lever aux aurores pour assurer le journal à l’heure où les autres partent au boulot.

Reproches fondés ou non, je trouve insupportable dans un pays affiché démocratique qu’ils soient injuriés sur de douteux  motifs. Quelques excités, sous couvert de la révolution jaune, ont é té jusqu’à en tabasser plusieurs, de toutes obédiences d’ailleurs. Est-ce que ce « peuple » ne supporte plus la réalité des faits ? Préfèrerait-il vivre chez Erdogan chez qui il n’y aura bientôt plus de journalistes ?

Il y avait chez mes proches 2 journalistes. Ils ont quitté le métier, donnant à penser qu’ils ne croulaient pas sous des liasses d’euros et qu’ils ne se prélassaient pas dans leur petit jardin d’Eden. Et d’ailleurs, dans les métiers préférés des français, la profession accroche péniblement le top 10 à la dernière place, après les cuisiniers, les vétérinaires. C’est dire ! Et malgré ce brouillamini, surexposé en ce moment, j’espère qu’on aura toujours de ces forçats de la vraie nouvelle, pesée, vérifiée, pour qu’on croie encore mériter notre démocratie.

11:11 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (1)