16/05/2019
J'avais 12 ans
Au cours d’une recherche un peu erratique dans ma bibli, je suis tombé sur ce Jean-Louis Fournier : « Mon dernier cheveu noir ». Faute d’une fouille dans mon passé capillaire, je ne peux dater pour moi ce même évènement. Par contre, comme pour lui, cela m’a renvoyé à mon enfance lorsque j’étais un peu joufflu et pourvu d’ une abondante crinière noire.
Et tout particulièrement à mon entrée au petit séminaire de Vaux sur Poligny. Muni pour tout viatique des paroles du vicaire qui avait emporté l’affaire dans mon dos avec ma mère : « Tu verras, il y a une jolie rivière, la Glantine, et tu auras un beau missel », je m’attendais quand même à quelques changements.
Dont celui des cours. Venant d’une 6ème « moderne », avec maths, physique et Anglais, j’allais m’en payer une autre avec l’incontournable trilogie français-latin-grec et allemand. Mais pas vraiment le nouvel emploi du temps du type goulag ! Levés à 5h15, suivi immédiatement du « décrassage » dans la cour, en chemise, pull interdit. Dans ces régions, au petit matin il peut faire des -10 à -12°. Après de rapides ablutions au dortoir, c’est la méditation, suivie d’une étude, puis de la messe, ce qui nous mettait au petit déjeuner vers 8 heures.
Quand j’évoque cela devant de jeunes générations, j’ai une petite attention polie, mais plus souvent un sourcil interrogateur : « Mais qu’est-ce que vous pouviez bien aller faire dans cette galère ? » Question sans réponse. Les p’tits jeunes ne peuvent pas savoir que ces drôles de rythmes sont l’armature du bati d’un inaltérable jurassien fait pour durer.
Ils ne se doutent pas non plus des milliers d’histoires qui pourraient émailler de longues veillées. Par exemple celle-ci, rare et donc extraordinaire, de l’envoi en vacances pour 3 semaines à la venue d’une épidémie d’oreillons pour éviter la pandémie totale. Assortie de la part de la sœur-infirmière, faisant allusion aux dommages irréparables que peut faire cette maladie aux testicules, : « Pour vous, prêtres, ça n’a pas d’importance ! »
Ce qui nous faisait bien rire à l’époque. On en rirait moins aujourd’hui, constatant que les bourses de certains clercs n’ont apparemment pas connu de sévères attaques des oreillons.
10:30 Publié dans santé | Lien permanent | Commentaires (2)
09/05/2019
Abondance de paroles jamais ne sera nourriture (proverbe malgache)
Revenant d’une rando à vélo, les yeux éblouis pleins de souvenirs de paysages de gorges somptueuses ou de cette grotte Chauvet merveilleusement reconstruite ou des échanges croquignolets des 4 générations présentes, je ne me sens pas capable de les exprimer à la hauteur voulue. Je n’ai plus qu’à revenir vers un quotidien fadasse plus à ma portée.
Réveillé pourtant ce matin par cette curiosité : pour 40% de votants attendus, on compte 33 listes aux européennes. Certes pas toutes fanatiques du destin européen. Ne serait-ce que les présumées 2 premières très occupées à rejouer la revanche de la présidentielle. Et il faut bien tout le brouhaha médiatique pour que le demi-point qui les séparerait soit considéré comme l’enjeu majeur de l’élection.
Dans le capharnaüm annoncé, les partis de gauche ont joué leur partition habituelle : le fake-puzzle. Soit des pièces disséminées partout et il faut absolument éviter que l’une s’emboite avec une autre. Si par hasard cela se produisait, au vu des échanges vipérins qui ont précédé, l’allure du tableau ainsi réalisé serait d’un piètre goût.
Ces milliers de gilets jaunes qui ont réussi à perturber le fonctionnement de l’état se devaient d’être là. A leur façon : avec 3 listes irréconciliables. De ce qu’on avait pu saisir sur les ronds-points, il n’émanait pas de leurs discussions un ardent souci de restaurer l’Europe.
Cette élection a le don de faire surgir un certain nombre de candidats-clowns. Ils sont rejoints cette fois-ci par de nouveaux artistes tels que le « parti animaliste » ou le « parti pirate ». Malgré son côté folklorique, la liste « esperanto » a du moins une coloration qui pourrait être européenne.
Ces européennes nous offrent une autre bizarrerie. Alors qu’à la création de l’Europe, on voulait cimenter la paix entre les nations, c’est maintenant dans chaque nation qu’elle provoque la guerre !
10:16 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (0)
26/04/2019
Stances à un cambrioleur
Depuis si longtemps, Brassens m’a habitué à dire les choses si joliment, même les cruelles, que ses mânes ne m’en voudront pas de lui avoir emprunté ce titre. Depuis les 1ers cambriolages qui avaient baptisé notre installation dans une nouvelle maison dans les années 80, « serein, bucolique, je dormais comme un loir ». Aussi, quelle surprise en revenant de balade ce jeudi matin.
Après le petit moment d’espoir en voyant les fenêtres grandes ouvertes et que cela soit l’effet du vent, le grand charivari qui m’attendait ensuite ne faisait guère de doute. Tous les rayonnages vidés, le linge jonchant le plancher, les tiroirs et plein de boites vides répandus sur le lit, signaient un nouveau cambriolage.
On ricanait bassement quand l’artiste moquait les pandores. Nos gendarmes, arrivés rapidement, nous ont démontré leur professionnalisme et leur empathie en ces circonstances. Nous avons même eu une sorte de sympathie pour la gendarmette, chargée des empreintes, avec pour elle aussi quelques soucis domestiques.
Après leur départ, un repas tardif mais consistant et même une sieste dans un lit épargné, il fallait bien s’atteler aux détails du « sinistre ». Et se reposer sur l’optimisme de mon épouse disant que c’était l’occasion de trier des choses inutiles. Profiter de quelques épisodes tragi-comiques. Comme cette boite recelant quelques vieux slips qui nous a fait penser que ces coquins préféraient le luxe, avant qu’on ne retrouve plus tard dans le bazar les vrais slips, « ceux qui signent les vrais hommes »
Mais tout n’était pas comique. En plus de l’argent disparu, il y avait cette bague acquise chèrement en Birmanie, un bracelet non moins précieux dans le souvenir, puisque acheté au MET de New-York au cours d’une mémorable randonnée à vélo avec mon expert culturel-cyclo de fils. Et bien d’autres choses dont je réserve la primeur à mon assureur.
Mais ils n’ont pas pris mon ordi, l’appareil-photo, ni la guitare ( probablement pas au nom de « la solidarité sainte de l’artisanat ») Ces voleurs à 10 minutes-chrono emmènent ce qui tient dans les poches et permet de courir si besoin.
On peut quand même leur trouver une pointe de courtoisie. Mon épouse pourra arborer, pour nos noces de diamant, les colliers de moindre valeur qu’ils nous ont laissés. Après avoir délesté mon porte-monnaie de ses billets, ils ont épargné les pièces jaunes pour que je puisse apporter mon écot à la fondation éponyme de madame Chirac.
Et puis si je ne leur dois pas une chanson, dont je serais incapable, je leur dois quand même ce post aux couleurs de la mélancolie et du fatalisme.
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