09/06/2023
Y'a pas que les bagnoles dont on teste la vétusté
Je vais être moqué de servir du médical après avoir commis déjà une semaine médicale sur ce blog. Classé aussi parmi les anciens combattants des cabinets médicaux, égrenant avec une certaine satisfaction, la litanie de leurs rendez-vous et de leurs piluliers qui débordent. Mais il s’agit aujourd’hui d’une affaire exceptionnelle : la consultation d’évaluation gériatrique, sur impulsion filiale, où nous nous rendîmes cette semaine.
C’est une rencontre avec une sorte de généraliste spécialiste-vieux qui vous explore de la racine des cheveux (même épars) jusqu’aux orteils. Et sous le feu de ses questions et exercices, on ne risque pas de planquer un pet de travers dans ce scanner intégral.
Nous attendions le verdict avec une certaine inquiétude. Dans ce standard&poor’s de la vieillesse, nous n’avons pas obtenu les AAA, réservés aux athlètes de haut niveau bien conservés. Mais nous avons les AA qui disent qu’on fait bien notre âge, ni trop au-dessus, ni trop au-dessous. Toutes nos fonctions un peu déglinguées ne sont que les avatars des octogénaires. La docteure a avoué oublier aussi des mots et n’a pas jugé bon de nous tester en Alzheimer. En gros, on n’a pas à pleurer sur notre sort.
Pour autant, elle n’allait pas nous donner le permis de poursuivre sans l’assortir de quelques conseils. Le 1er, assez facile à réaliser, il faut manger, manger de tout, mais manger. Nourrir nos reliquats de muscles dont on n’a pas fini de se servir. Et, spécialement pour nous jurassiens, manger du Comté avant la chute du calcium. Après avoir constaté, avec une grande satisfaction, que nous n’étions pas fumeurs, elle nous a incité à boire, beaucoup. N’importe quoi, à son avis. On a même cru déceler que l’apéro n’était pas à exclure absolument. Privilège de l’âge ?
Enfin, bien dans l’air du temps, bouger, marcher et tout le sport qu’on veut. Heureux de constater que sous patronage médical, je me soigne en faisant du vélo. J’ai un peu de temps pour le dernier conseil, travailler mon équilibre, pour rester sur mes jambes à ski de fond.
0n a compris aussi que, épargnés d’une maladie fatale, le mieux serait de profiter de la vie avec un certain plaisir. Aussi bien, on n’est pas prêts à se triturer bras et jambes, comme on voit quelques-uns se décarcasser, pour quelle gloire ? Pour laisser un nom dans l’histoire ? Ceux qui guettent un tel destin devraient réfléchir à ce piteux constat. On se souvient juste de Clovis à cause du fameux vase de Soissons. De Marat, assassiné dans sa baignoire à cause du tableau de David. Bref, déjà, d’accessoires. Avançons, sereins, le terminus est peut-être encore loin !
15:33 Publié dans santé | Lien permanent | Commentaires (0)
02/06/2023
Servitude et grandeur de la bipédie
Si j’emprunte mon titre, partiellement, à celui d’Alfred de Vigny, c’est que tenir debout, dressé sur ses 2 jambes, résulte d’un long combat. Ce qu’illustre la fameuse frise où on voit un singe à 4 pattes se redresser peu à peu jusqu’à l’homme debout sur ses jambes, bipède. Une évolution qui a pris des millions d’années.
Je ne voudrais pas faire mon pédant, mais les paléontologues expliquent que l’homme a conquis sa démarche équilibrée, son buste droit, aux dépens des autres primates, (avec lesquels on partage pourtant à 98 pourcent une ADN semblable) grâce à l’allongement du fémur, l’inclinaison de la hanche. Cela, au prix du renforcement, paradoxal, des muscles fessiers. Ce qui fait dire à Buffon, au 18ième siècle : « L’Homme, c’est la fesse ».
Ce que Buffon ne pouvait pas prévoir, c’est que 100 ans plus tard, cet homme aux muscles et aux articulations adaptés à la bipédie, allait poser ledit fessier sur une selle, devenant alors un vélocipédiste. Perché plus haut, se déplaçant plus vite, un monde nouveau s’offrait à lui.
Je viens de le constater dans une randonnée interrompue par une triste nouvelle. Rouler à vélo fait défiler une palette de paysages, repérer la clairière herbeuse adaptée au pique-nique. Et à l’étape, échanger avec des personnes chères qui montrent qu’elles ont d’autres talents que le pédalage.
Bien que la selle du Baron Drais en bois ait fait place à une assise plus souple, ces bonheurs se paient d’un petit ennui. On retrouve Buffon qui avait raison : c’est la fesse qui trinque à vélo, même lorsqu’on se laisse aller à un doux pédalage. D’où la quête de confort supplémentaire.
Qu’on a pensé trouver avec le vélo électrique. Et depuis longtemps. Mon grand-père maternel, l’homme de Billey, partait à 81 ans sur un Solex, sous les yeux quelque peu effarés de son épouse. (C’est possible qu’il y ait une sorte de virus familial qui pousse les membres de la fratrie à faire le guignol, à 80 ans passés, sur 2 roues même électrifiées. Le pire : avec ou sans batterie, on garde la fesse dolente.
Ce qui peut nous consoler vient du sage Montaigne et m’offre une petite vengeance vis-à-vis des malins qui ont fait l’E.N.A. et appris, dès Sciences-Po, à ciseler des périphrases absconses : « Si haut que soit le trône, on n’est jamais assis que sur son cul » !
11:15 Publié dans Sport | Lien permanent | Commentaires (1)