05/04/2019
Le climat se déglingue, le respect aussi
C’est assez courant pour ma génération de présenter la trilogie « le maire, le curé, l’instituteur », et la déférence qui leur était due, comme le parangon d’une sociabilité acceptée. Ce qui est incomplet car en ces époques « bénies », le respect, la courtoisie, valaient pour tous de la part de tous. Mes contemporains ne vont pas manquer de faire remarquer que c’est là une vue un peu édéniste, car, soulignent-ils, il y a eu des mal-élevés de tous temps. Et la sagesse présumée des anciens s’est un peu délitée au gré des révolutions numériques, morales, religieuses.
Il n’empêche, je trouve qu’il y en a un peu plus et singulièrement vis-à-vis des vieux à qui on manquait rarement de respect autrefois. L’illustration date de quelques minutes. Marchant sur le trottoir, je vois venir à ma rencontre 3 jeunes, probablement sportifs puisqu’avec ballon. Ne voulant pas interrompre leur conversation, c’est un petit bulldozer qui s’avance et me fait rejoindre la voie des autos.
Certains de mes collègues en âge estiment que ces comportements sont dus au fait que les vieux sont devenus transparents. Je ne le crois pas, en témoigne cet exemple. Dans le bus, ce jeune qui m’a envoyé son sac dans la figure pour se jeter sur une place libre affiche un sourire narquois à mon passage qui dit bien : avec ton pas de civilisé, tu t’es fait piquer ta place.
Pour ne pas charger davantage ces jeunes, je dois confesser que des vieux, cyclistes par exemple, occupent la chaussée comme en terrain conquis. La conduite de leur engin évoque celle adoptée par quelques mères vous poussant dans les jambes une poussette-char d’assaut, puisqu’elles sont sûres de véhiculer le Mozart du siècle.
Je ne suis pas sûr que mon âge, qui ne se voit pas au 1er coup d’œil sur les pistes de fond, en soit la cause. Mais j’ai encaissé en Vanoise de la part d’un ni-jeune, ni-vieux, à qui je n’aurais pas laissé assez de piste à ses exploits le peu aimable : « vieux con » ! En 35 ans de pratique assidue des pistes, j’ai pu surprendre quelquefois des signes d’énervement, des sourires de commisération, mais jamais d’injures en ces lieux voués au plaisir.
De ces quelques rebuffades, je ne conclus pas que quelques affolés de la planète à 10 milliards d’habitants cherchent à passer par-dessus bord ceux qui ont déjà bien vécu. D’ailleurs des jeunes se rendant au stade, des autres probablement, nous saluent respectueusement. Et quand mon épouse, à celui qui vient de jeter son papier par terre, lâche son habituel : « tu as perdu quelque chose », elle ne récolte pas de doigt d’honneur, ni même un soupçon de grommelement entre les dents.
08:45 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (0)
Les commentaires sont fermés.