05/11/2020
Nos héros du quotidien
Parmi les divers tracas que nous a valu la pandémie, elle nous a aussi régalé de moments lumineux. Par exemple la reconnaissance unanime des citoyens à l’égard des soignants qui se manifestait chaque soir par des applaudissements à 20 H. Et qui sont en train de retourner au charbon pour un temps indécis. Pourtant ces personnes ne font que leur travail, mais dans un contexte tellement bouleversé qu’ils ont du trouver des solutions hors de l’ordinaire. On les a sacrés à cette occasion comme des héros et des héroïnes.
Cela me donne l’envie, dans le tohu-bohu du moment, de citer quelques autres héros du quotidien. Ce vieux médecin d’un gros bourg par exemple, qui a préparé avec son épouse depuis plusieurs années un repos mérité. Et faute de remplaçant, il poursuit jusqu’à 73 ans en refusant d’abandonner ses patients.
Cela peut être aussi ce policier qu’un ado abreuve d‘injures. Plutôt que de sortir la bombe lacrymogène ou la matraque, il lui montre que l’ordre c’est garder son sang-froid. La mère de l’ado justement, je la vois gérant seule ses enfants. Si elle doit aller au commissariat récupérer son gamin, elle ne va pas sur-jouer une autorité du moment, mais sort avec dignité, remettant la discussion pour le retour à la maison.
C’est encore notre ami Thuram qui raconte qu’il entendait des cris de singe quand il jouait en Italie. Plutôt que la haine ou les envies de vengeance, il consacre sa retraite à réfléchir au pourquoi de ce racisme pour en éclairer les comportements des uns et des autres.
Je suis impressionné par cet homme qui sait sa fin inéluctable. Il réunit ses proches et taisant son angoisse de la mort très compréhensible, se force à un adieu serein à chacun aussi calme que s’il partait en voyage. Cet exemple m’interroge : dès qu’il est question de courage et de sang-froid, on se demande : « est-ce que j’en serais capable » ?
Mon épouse donne une forme de réponse. Dans les années de son mari en Algérie déjà, il fallait assurer la vie domestique avec un enfant et ne pas montrer son inquiétude. Quand son mari a créé une entreprise et l’incertitude dans le foyer, sans être aux commandes, elle a assuré toute l’intendance. Dans les mois d’hôpital qui ont suivi un grave accident, elle faisait taire son inquiétude pour assurer la vie au foyer.
Si je fais mine de la ranger dans les héroïnes du quotidien, elle va se récuser en disant que beaucoup de femmes sont prêtes à tenir un tel rôle simplement par amour. Une valeur qui semble se dévaluer et dont on devrait parler davantage plutôt que du féminisme de combat d’une Alice Coffin ou de Judith Butler !
10:48 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (0)